Voilà, cet été je tourne toute une page de ma vie. En août, pour mes 29 ans, je quitte la région parisienne et Paname la grise.
Cet été, j'emménage à Lyon, capitale des Gaules.
Je vais regretter certaines choses, c'est vrai.
En premier lieu, le réseau des bibliothèques municipales, en particulier celle de Port-Royal, spécialisée en littératures SFFF, où j'ai lu et vu presque tous mes coups de cœur de ces dernières années.
La Bibliothèque nationale de France, aussi. Pourtant, je déteste ses murs anthracites, sa moquette rouge, ses lourdes portes, son air climatisé et ses multiples points de contrôle des sacs, des badges et des cartes d'accès. Mais les salles du Rez-de-Jardin K, L, M, R et S ont été mon second domicile durant les six années écoulées. Je connais par cœur ses interminables couloirs, ses toilettes à la propreté aléatoire, ses chaises inconfortables, ses tours de climatisations infernales, et son personnel en manque de soleil et de salaire convenable.
J'y ai aussi travaillé une année complète, en tant qu'agent technique de numérisation vacataire. J'ai vu l'envers du décor, et croyez-moi, ce n'est pas reluisant. Les fous-rires avec mes collègues me manqueront. Les délicieux desserts de la cantine aussi. Surtout, l'émerveillement toujours intact devant les collections qui envahissent le moindre espace libre. La BnF lutte pour trouver de la place.
De tout ça, j'en parlerai une prochaine fois, car il y a tant à dire sur les vieux livres...
Les musées. Les fameux musées, où toutes les expositions donnent envie de s'y précipiter, leurs affiches toutes plus alléchantes les unes que les autres. Combien de fois n'ai-je pas bavé devant, alors que je courais d'un métro à un autre, d'une urgence à l'autre, toujours pressée et anxieuse d'être à l'heure.
Toutes ces expositions que je n'ai pas vues.
Parce qu'à Paris, lorsqu'on arrive au vendredi soir, on est déjà tellement épuisée qu'on s'avachit dans un fauteuil, un lit, on s'étale sur le sol en mode carpette, et on ne bouge plus jusqu'au lundi matin, sauf si l'on a une soirée de beuverie programmée. Pas le courage d'affronter encore le métro, le bus, le tram, le RER. Plus que tout, pas le courage de se confronter aux gens, aux touristes et aux pigeons.
Paris-village. Il faut le reconnaître, Paname est belle. Lorsqu'on prend le temps et la peine de la parcourir, ses rues révèlent bien des coins charmants. Ces petites ruelles pavées à la végétation délicate, ces portes cochères anciennes, ces allées privées construites dans les années folles et qui arborent l'éclat de l'Art Déco, ces zones ignorées des touristes (mais jamais pour longtemps) où l'on peut dénicher street art et vieilles bâtisses. Ces quartiers soi-disant affreux et populaires où j'ai vu les plus beaux tags, les plus surprenants collages, des battles de danse improvisées, et où j'ai respiré des odeurs que même la banlieue ignore.
Malgré tout, Paname est cruelle, usante et irrespirable.
Près de onze millions de personnes y habitent et/ou transitent chaque jour. Les pigeons la couvent de leurs ailes grasses et de leurs déjections incessantes. La pollution noircit tout, jusqu'à vos sinus. Tout va vite, la foule est omniprésente, son mouvement effréné. La déambulation est un art que peu maîtrisent.
La vie est chère. L'immobilier est cher. La culture y est plus chère que ce qu'on pense.
Et, pire que tout, l'humeur est morose, agressive. Des altercations peuvent éclater à tout moment. Des agressions se produire sans que vous les voyiez arriver.
Paris est en guerre permanente avec elle-même et avec sa banlieue.
Les RER sont des frontières mobiles et les rancœurs germent tout du long.
Je suis née en banlieue parisienne, j'y ai grandi, j'ai rêvé d'habiter un jour cette capitale qui me paraissait si lointaine, si belle et enviable. La vie y serait forcément plus agréable, pensais-je.
J'ai vite déchanté.
Et aujourd'hui, je ne supporte plus cette ville.
Pourtant... elle me manquera.
Disons que je m'en éloigne pour mieux l'aimer.
Née à Paris et l'ayant quittée depuis, ton article résonne très très fort en moi.
RépondreSupprimerJe suis d'accord avec tout, voilà. Et en plus tu as une très jolie plume...
Provinciale jusqu'au bout des ongles, je ne peux m'empêcher d'être contente que tu quittes Paris (que les amoureux de Paris me pardonne, mais Paris, je ne peux la tolérer que sur une journée ou deux, pas plus. Et rien que ça, ça me stresse beaucoup ^^").
RépondreSupprimerbref, Lyon, je connais un peu, c'est très sympa, et je te souhaite de t'y plaire ! :)
Bonne installation !
La sudiste que je suis a détesté la ville en y posant le pied. La culture, oui, mais y vivre, non. ^^
RépondreSupprimerJe suis triste de te voir partir mais heureuse de te savoir à Lyon pour cette nouvelle étape qui t'ouvre les bras. Paris est tellement comme tu l'as décrit, avec ses étincelles qui se mêlent à la grisaille, avec ses mauvais côtés auxquels on finit par s'attacher. Ton article résonne très fort en moi et je suis heureuse de me dire que c'est ma dernière année dans cette ville pour pouvoir profiter de tous ses détours (et mon canapé/chambre d'ami t'est toujours ouvert ;) ).
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